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Covid-19 : Qu’en est-il des industries culturelles?

La pandémie de Covid-19 a frappé de plein fouet la Culture depuis la fermeture le 16 Mars, de tous les lieux accueillant du public. Étudiantes à l’Université de Lille en Licence Industries culturelles, art et sociétés, nous avons voulu rendre compte des dispositifs élaborés par les structures culturelles en temps de crise pour répondre au mieux aux attentes des publics, mais également aux aides mises en place par l’Etat, les collectivités territoriales, la Région, les villes, afin d’éviter que le milieu culturel n’en pâtisse trop, ainsi que des réflexions autour de la survie et la réorganisation du monde de la culture à travers le numérique.

Au début de la crise, des initiatives en interne de la part des industries culturelles (musée virtuel, concert en live, cinéma en vod, livre numérique, …) ont été élaborées pour perdurer malgré la pandémie.

La crise sanitaire a directement impacté les entreprises culturelles dans leur fonctionnement, dans la mesure où ces lieux accueillant beaucoup de public ont été les premiers à fermer dès l’annonce du stade 3. L’épidémie a entraîné un changement structurel au sein de la culture. Avec des reports, des annulations, des fermetures temporaires, la vie culturelle en a été durement affectée.

Pour faire face à cela et au-delà du manque à gagner financier, certaines infrastructures, notamment les musées, ont mis en place des expositions virtuelles afin de continuer d’entretenir un lien entre la culture et les publics. Par exemple, ​le musée du Louvre dont l’objectif à la fin du XVIIIe siècle était de sortir les œuvres d’art des palais privés pour que le peuple puisse les voir, propose aujourd’hui des visites en ligne des différentes salles du musée, accessible via son site internet.(1) Cette carte virtuelle, inspirée d’un système de visualisation comme celui de Google Earth, permet au visiteur de se promener virtuellement dans les galeries. S’il souhaite en apprendre plus il lui suffit de cliquer sur les points d’interrogations se situant à côté de chaque œuvre afin d’obtenir les informations des cartels (artiste, date, titre, explication).

Le 20 février 2020 soit quatre jours après l’annonce du confinement, le musée du Louvre postait sur son compte Twitter:

« Retrouvez l’expérience de réalité virtuelle ​ »En tête-à-tête avec la Joconde »​ chez vous ! Téléchargez l’application conçue avec​ ​@htcvivepour rencontrer la Joconde en personne !

Sur l’App Store :http://bit.ly/JocondeVRApp
Sur Google Play Store :
http://bit.ly/JocondeVRGoo»

Ainsi, en se servant des réseaux sociaux, le Louvre génère de la publicité en orientant le public vers une application permettant une découverte virtuelle d’une de ses œuvres la plus connue.

Par conséquent, l’offre culturelle à travers internet a profondément modifié nos habitudes depuis le début de la crise. Les plateformes de ventes de films par exemple se sont adaptées aux sortie prévues des films, qui se font dès à présent, directement en VOD. En effet, le cinéma est un art facilement adaptable au confinement. La plateforme de streaming Netflix a connu une hausse de ses abonnements de 47% aux Etats-Unis la semaine du 24 Mars, ce qui montre que le confinement profite à certains. (2)

La rentabilité du numérique n’est cependant pas la même pour tous. Certains (comme les site de commerce en ligne ) gagnent de l’argent, à contrario des salles de spectacles ou des musées, qui à défaut du gain financier, gagnent en visibilité. Ils informent les publics, les fidélisent mais, comme ces plateformes numériques sont gratuites, perdent de l’argent. (3)

En réponse à la crise de la culture en temps de pandémie, des organismes publics et privées ont tenté de venir en aide aux industries culturelles (au niveau national, régional, local).

« ​La crise sanitaire sans précédent qui touche notre pays frappe de plein fouet les acteurs de la culture. Nous devons tout mettre en œuvre pour assurer leur survie. C’est l’avenir même de notre modèle culturel qui est en jeu.» déclarait Franck Riester le 18 Mars dans un communiqué. (4)

Afin d’éviter une catastrophe économique et une fermeture définitive des lieux culturels, le Gouvernement, à travers des mesures de soutien, a renforcé le chômage partiel, a modifié les délais de paiement mais a également débloqué des fonds de solidarité pour les petites entreprises.

Une aide financière de 22 millions d’euros a donc été attribuée le 18 mars par le Gouvernement pour aider les entreprises du secteur culturel. 10 millions d’euros ont été débloqués pour la musique, 5 millions d’euros pour le spectacle, 5 millions d’euros pour le livre et 2 millions d’euros pour les arts plastique afin de ​« répondre au risque de disparition des structures culturelles, notamment les plus fragiles»​. (5)

A l’échelle régionale, la Région Hauts-de-France, bien qu’elle n’ait pas la compétence dans le domaine culturel, a elle aussi, voté des mesures exceptionnelles de soutien. La Région va soutenir les acteurs culturels en maintenant ses financements pour des opérations qui devaient se dérouler du 4 mars jusqu’à trois mois après la fin de la période d’urgence sanitaire. La Région a donc décidé de maintenir les subventions pour les manifestations annulées ou reportées ou les organismes culturelles dont l’activité a été réduite. (6)

Parallèlement, des initiatives locales ont été élaborées pour sauver la culture. De nombreuses associations ou entreprises culturelles ont lancé des appels aux dons de la part des citoyens pour préserver des lieux de vie et sauver un peu de notre identité. C’est le cas du ​Bistrot de Saint So​, lieu mythique lorsque l’on va voir une exposition ou profiter de la terrasse et des concerts gratuits de la ​Gare Saint Sauveur ​de Lille, qui jeté une bouteille à la mer en lançant un appel aux dons et à la générosité des publics afin de pallier au risque de fermeture imminente. Au delà des aides alloués par l’Etat, ces gains de solidarité à l’échelle locale vont peut être permettre de sauver des lieux de vie incontournables de notre patrimoine.

L’après confinement, une réflexion sur la survie et la réorganisation du milieu culturel ?

En effet, il est très compliqué d’envisager une réouverture des centres culturels, considérant ce secteur comme “la cinquième roue du carrosse”. Certes, les médiathèques, les bibliothèques et les petits musées ont un droit de réouverture à la sortie du confinement mais qu’en est-il du reste ? La culture est avant tout un pilier dans la vie sociale, qui permet un partage inimaginable dans la société actuelle. Il est donc primordial de trouver des solutions pour la faire vivre un maximum, car n’oublions pas que la culture fait aussi partie des enjeux économiques majeurs du déconfinement.

A la sortie de cette crise, nos modes de consommation risquent de drastiquement changer étant donné que le numérique aura occupé une place considérable dans nos foyers durant deux mois. Le télétravail est déjà entré dans les mentalités mais qu’en est-il de la culture ? Les organismes culturels qui ne vont pas rouvrir immédiatement à la fin du confinement devront continuer à adapter leurs modes de fonctionnement. C’est pourquoi, le numérique est en passe de révolutionner nos modes de consommation.

A cet effet, de nombreux artistes se sont mis au live sur leurs réseaux sociaux nous permettant de les suivre un maximum. La culture a tenté de se réorganiser afin de permettre aux individus d’en profiter tout de même. Bien évidemment, rien ne remplacera cette osmose que crée un concert, un opéra, un film diffusé au cinéma, une pièce de théâtre etc… Mais grâce au numérique, nous avons un accès (limité, mais présent) à la culture.

Par conséquent, le Covid-19 pourrait amener le marché culturel à réfléchir quant à une possible évolution/ adaptation de ces modes de diffusion.

Conclusion

Les initiatives prises dans le domaine de la culture, bien qu’elles soient établies pour répondre à la crise sanitaire de Covid-19, peuvent être des réponses futures à des nouvelles formes de médiations, de diffusions et d’approche de la culture. Cela peut également amener à diversifier les publics.

Nell Turzynski, Elise Blondeel, Lison Dewaele

(1) ​Site internet du Musée du Louvre : ​https://www.louvre.fr/visites-en-ligne

(2) ​Raphaël Grably, ​“Coronavirus: Netflix et Disney+ face à une explosion du nombre d’abonnés aux Etats-Unis”, ​BFM TV, le 24/03/20, consulté le 29/04/20. URL : https://www.bfmtv.com/tech/coronavirus-netflix-et-disney-face-a-une-explosion-du-nombre-d-abonnes-aux-etat s-unis-1881153.html

(3)Michel Guerrin, “​Coronavirus : « Que l’industrie numérique culturelle sorte renforcée du confinement est dansl’airdutemps»”,L​ eMonde, le27/03/20, consultéle09/05/20.URL:https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/03/27/coronavirus-que-l-industrie-numerique-culturelle-sorte-renforc ee-de-cette-crise-est-dans-l-air-du-temps_6034578_3232.html?fbclid=IwAR3XrGNzKElFhi2h8dyLkd3XGm3N KadD3OWTqrvy6W5NiZqPXjapPuBhpH0

(4) Communiqué de presse du Ministère de la Culture du 18 mars 2020 : ​“Crise sanitaire : premières mesures du ministère de la Culture en soutien au secteur culturel”​. URL : https://www.culture.gouv.fr/Presse/Communiques-de-presse/Crise-sanitaire-premieres-mesures-du-ministere-de -la-Culture-en-soutien-au-secteur-culturel

(5) Ibid

(6) Site web de la Région Hauts-de-France, “ ​La Région soutient les acteurs culturels”, ​le 10 avril 2020. URL : https://www.hautsdefrance.fr/la-region-soutient-les-acteurs-culturels/?fbclid=IwAR0C41fk_uWXCzcwZvFEQB zAuwK2dVfJ-8FU1ZVEj89MadDOrkyaB1Ui8AU&cn-reloaded=1